Allô Japon #6 : Le déclin des constructeurs japonais

Par La Rédac LesMobiles - 26 octobre 2014 à 13:36
La singularité de la culture japonaise s'applique aussi aux constructeurs nippons. Véritables pionniers de la téléphonie mobile hier, ils sont aujourd'hui bien mal en point. Explication de ce phénomène.
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Il y a encore 10 ans, les Sharp, Fujitsu, NEC, Panasonic ou encore Sony étaient les rois de la téléphonie mobile au pays du soleil levant, mais ces derniers n'ont pas su négocier l'arrivée des smartphones et se retrouvent aujourd'hui derrière Apple, ainsi que Samsung ou encore LG. Alors que les Japonais appliquent assez naturellement la préférence nationale en termes de produits électroniques, pourquoi un tel revirement ?

Le syndrome Galápagos

Lorsque Charles Darwin arriva aux îles Galápagos, il découvrit une faune et une flore qui avaient évolué de manière singulière et impressionnante par rapport au reste du monde. Cependant ces organismes ne pouvaient pas survivre en dehors de ces îles. Le syndrome Galápagos est comparable à l’évolution de la téléphonie nippone. En effet, bien avant iTunes, les lecteurs d'empreintes digitales ou encore Apple Pay, les constructeurs japonais avaient déjà tout inventé, en étroite collaboration avec les opérateurs.

Ainsi le premier service de téléchargement de sonneries date de l'an 2000 et a été popularisé grâce à l'i-mode créé par NTT Docomo et le premier service de téléchargement de morceaux complets de musique appelé « Chaku-Uta full » date de 2004.

A l'heure où Apple vient d'annoncer son système de paiement mobile, Apple Pay, il est intéressant de rappeler que grâce à la puce Felica créée en 2004 par Sony, NTT Docomo a pu lancer le fameux « Osafu Keitai » (portefeuille mobile) qui sert à payer des achats ou encore à prendre le métro avec son mobile. Ce système, adopté par les trois grands opérateurs, équipait pas moins de 50 millions de terminaux en 2009. Les exemples sont encore nombreux. Sharp a commercialisé en 2000 le premier téléphone équipé d'un appareil photo, et en 2005 un téléphone équipé d'un podomètre capable de mesurer le pouls.

Distributeur au Japon

Pourquoi une telle maîtrise du hardware n'a-t-elle pas aidé les constructeurs japonais à devenir les leaders de la téléphonie mondiale ? Il y a plusieurs raisons à cela, et le syndrome Galápagos en est la meilleure explication. Toutes ces innovations ont fonctionné au Japon car les japonais sont friands de nouvelles technologies et adoptent les nouveautés facilement. Cependant les constructeurs n'ont pas su adapter leur hardware (et leurs softwares compliqués) aux marchés étrangers. Ils n'ont ainsi pas pu s'étendre en dehors de l'archipel et sont restés maîtres uniquement sur le marché local.

La faute à un management qui se concentre encore aujourd'hui sur les besoins de la clientèle nippone sans assez tenir compte des besoins des clients étrangers et notamment des pays émergents. A l'opposé d'Apple, qui se concentre sur le design et la conception hardware et software, mais sous-traite la fabrication en Asie, les constructeurs japonais sont restés enfermés dans une organisation industrielle verticale en créant et fabriquant le hardware au Japon. Sony a cependant limité les dégâts grâce à son partenariat avec le suédois Ericsson qui lui a permis de s'implanter en dehors de l'archipel.

Le rendez-vous manqué avec les smartphones

Les opérateurs ont également une grande part de responsabilité dans cet échec, et l'arrivée des smartphones - en particulier de l'iPhone - leur a donné le coup de grâce. En 2008, lors du lancement du smartphone d’Apple, les constructeurs japonais ainsi que et les opérateurs japonais (en particulier NTT Docomo) sont restés très frileux quand à cette évolution de la téléphonie mobile. Les grandes marques nippones élaboraient alors des terminaux à chaque saison pour les opérateurs, ces derniers assurant même exclusivement leur promotion.

Paiement au Japon

Forts de leur avance technologique, ils n'ont pas éprouvé le besoin d'élaborer des smartphones qui les éloigneraient de leur habitudes industrielles bien établies. Cette décision leur a coûté très cher, car le succès de l'iPhone a été fulgurant.

Perdant de nombreuses parts de marché chaque année, des marques comme NEC ou encore Panasonic ont annoncé en 2013 qu'ils ne produiraient plus de téléphones mobiles. Fujitsu essaie de résister en s'attaquant à la niche des seniors avec ses téléphones Raku-Raku, faciles d'utilisation et également commercialisés en France en partenariat avec Orange. Sharp, avec sa gamme Aquos, a quant à lui adopté le système d'exploitation Android et espère devenir le premier fournisseur de l'OS de Google dans l'archipel en 2014. Il a d'ailleurs récemment créé le buzz avec son fameux Aquos Crystal, un smartphone haut de gamme avec un écran sans bords.

Sony Mobile

Longtemps soutenus par NTT Docomo, les constructeurs japonais ont fait la grimace quand celui-ci a privilégié les smartphones Sony Xperia, mais surtout la gamme Galaxy de Samsung en 2012, afin de contrer KDDI et Softbank qui vendaient l'iPhone. Et comme dernier coup de massue, l'opérateur a signé en 2013 un accord avec Apple afin de commercialiser l'iPhone à son tour. Même Sony, qui est le seul constructeur à résister à l'avalanche grâce à sa gamme Xperia, vient d'annoncer des pertes de 1,7 milliard d'euros et une réduction de 15% des effectifs de la division mobile.

Le futur semble bien sombre pour les constructeurs japonais et ils payent aujourd'hui leur mauvaise stratégie et leur scepticisme à l'égard du marché des smartphones. Pourront-ils inverser la tendance et mettre à profit leur formidable qualité d'innovation qui, combinée avec un marketing plus efficace qu'auparavant, pourrait les sauver du naufrage ? Pas si sûr, car ils vont également devoir faire face à l'arrivée massive des constructeurs chinois qui risquent de les affaiblir davantage.

Sony Smatphone japonais

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