Apple App Store : la firme caresse les développeurs dans le sens du poil

Cette semaine a eu lieu la WWDC d’Apple. Hasard (?) du calendrier, un article publié par Reuters expliquait quelques heures avant l’ouverture de la conférence la stratégie de la firme pour améliorer la visibilité et les revenus des créateurs d’applications.

La Rédac LesMobiles - publié le 15/06/2016 à 17h06
Apple App Store : la firme caresse les développeurs dans le sens du poil

Apple sollicite de plus en plus les développeurs pour participer à l’expansion fonctionnelle de son écosystème. Lors de la WWDC, le nombre de connecteurs pour les différentes briques technologiques liées à iOS, watchOS ou tvOS a encore augmenté. Parmi les connecteurs évoqués cette semaine à San Francisco, nous avons relevé ceux pour Siri, pour les nouveaux widgets de l’écran de verrouillage, pour Home, pour Messages, pour Telephone, pour Plans ou encore pour 3D Touch. Bref, les développeurs sont invités à profiter des nouveautés d’Apple pour que cette dernière en profite également (mais davantage pour le côté financier de l’affaire).


La barre des 2 millions a été franchie depuis 2016, annonce faite par Tim Cook à la WWDC

Le fossé s'élargit entre les grands et les petits

Or, les développeurs sont blasés. Certes, il existe 2 millions d’applications sur l’App Store, dont 14 000 nouvelles chaque jour. Certes, ces applications ont été téléchargées, cumulativement, 130 milliards de fois. Et Apple aurait reversé 50 milliards de dollars aux développeurs (soit 10 milliards de plus qu’en janvier dernier), des chiffres annoncés par Tim Cook lundi soir. Cependant, tout cela cache les véritables statistiques de l’App Store : 1 % des applications génèrent 94 % des revenus. Une situation qui s’est considérablement dégradée en 4 ans, quand ce même 1 % générait alors 80 % des paiements réalisés par les consommateurs, alors que l’App Store ne cesse de générer plus d’argent (croissance annuelle de 35 % enregistrée au premier trimestre 2016).

Les liens sponsorisés arrivent

Le fossé s’agrandit donc entre les « super développeurs » et les autres qui ne parviennent pas à toucher les utilisateurs de terminaux sous iOS. Apple aurait donc décidé d’effectuer quelques changements, à en croire nos confrères de The Verge qui ont eu l’opportunité d’échanger avec Phil Schiller, le vice-président marketing d’Apple en charge des terminaux et de l’App Store. Le premier est l’arrivée de liens sponsorisés au-dessus des résultats d’une requête effectuée via le moteur de recherche de l’App Store, un peu à l’image des liens de Google Search. Cela avait fuité il y a quelques semaines.

Cependant, il y a deux bémols. D’abord, ces liens sponsorisés favoriseront les corporations capables de se payer les mots-clés utiles et efficaces. Bref, ce sont ceux qui gagnent le plus qui profiteront de ce service et qui continueront de bénéficier de la majeure partie des espaces promotionnels. Ce que Phil Schiller refuse d’avouer, estimant que le système d’enchère est équitable. Ensuite, c’est la première fois qu’un service Apple va être partiellement financé par la publicité, ce que la firme de Cupertino s’est refusé à faire jusqu’ici, « parce que le client Apple n’est pas un produit qui se commercialise ». Il semble que le recul des ventes d’iPhone ait eu raison de ces principes.

Le modèle par abonnement généralisé

La seconde initiative concerne la répartition des revenus générés par les applications. Le célèbre 70/30 (70 % pour les développeurs, 30 % pour Apple) restera identique sur les ventes « One Shot ». En revanche, un subtil changement va apparaitre pour les développeurs qui commercialisent un abonnement à leurs usagers. La première année, la répartition restera identique à celle d’aujourd’hui (70/30), tandis que dès la seconde année, la part d’Apple descendra à 15 %. Ce qui amènerait les développeurs à considérer davantage le maintien des applications existantes, puisque les mises à jour, fidélisant les usagers, deviendraient une source de revenus (et non plus un poste de dépense), même pour les plus grands éditeurs qui ont quelques difficultés à se renouveler.

En outre, dès la mise en ligne de la nouvelle version de l’App Store, la vente d’abonnement sera proposée à tous les développeurs, notamment les jeux vidéo (qui représente 75 % des revenus), et non plus à certaines catégories seulement (rencontre, streaming audio et vidéo, média, et stockage en ligne). Imaginez un Candy Crush avec une souscription mensuelle... Là encore, le modèle profitera davantage aux grands éditeurs. La conséquence sera considérable : de plus en plus d’applications seront gratuites en téléchargement, et deviendront payantes à l’usage. Ce qui va certainement avoir un impact sur certains indicateurs économiques, qui baisseront dans un premier temps, pour remonter ensuite.

Un double enjeu pour Apple

Il y a un double enjeu derrière l’ensemble de ces changements. D’abord, il faut remotiver les développeurs à créer de nouvelles applications et à améliorer celles qui existent déjà. Car sans cela, iOS perd de l’attractivité face à Android. La communauté des développeurs d’iOS est encore forte, mais elle grince des dents quand sont évoquées les questions d’équilibre économique, de « taxe Apple » (les 30 % que la firme conserve sur les ventes d’applications) et de visibilité.

Le second enjeu est purement financier. À l’heure où les ventes d’iPhone reculent (même si Tim Cook affirme que la tendance sera à la hausse en fin d’année), les revenus liés aux services sont de plus en plus cruciaux dans le nouvel équilibre économique qui se dessine. Et l’App Store en est l’un des points centraux. Apple sait que sans développeurs, l’App Store ne rapportera rien. D’où l’intérêt de l’abonnement et de la nouvelle répartition incitative : les développeurs verraient leurs revenus devenir plus réguliers, leur business plus stable, seraient amenés à continuer de maintenir leurs applications sur la durée, favorisant leur maintien dans la communauté. Encore faut-il trouver le moyen de toucher les clients...

Les publicités dans l’App Store seront en bêta durant quelques mois. Elles ne seront pas affichées sur les terminaux des mineurs de moins de 13 ans. Et Apple promet qu’il n’y aura aucun profilage marketing. Le modèle par abonnement, quant à lui, serait d’ores et déjà proposé aux développeurs depuis le début de la semaine. Et la nouvelle version de l’App Store arrivera cet automne, certainement avec l’arrivée d’iOS 10 et des nouveaux iPhone.

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